Influence réciproque du SOCIAL et du médicale dans l’approche des démences.
La centration sur l’altération des fonctions intellectuelles a entraîné une incidence au niveau thérapeutique. Jusqu’alors beaucoup d’études sur la stimulation cognitive ont été menées. Mais depuis quelques années les répercussions que ces pathologies ont, dans la vie même de l’individu, deviennent de plus en plus prégnant dans sa prise en charge. Le champ cognitif reste important car il vient attester l’impact sur le sujet de ces pathologies. Mais il est apparu que la nuisance vécue par le sujet est aussi largement due aux modifications concernant sa vie sociale et sa vie affective.
Ainsi les avancées concernant ces pathologies sont diverses et dans l’approche même des professionnels il y a un nouveau regard. Ceci peut être observé dans la littérature scientifique concernant ce champ des démences, tout comme les ouvrages de professionnels travaillant au contact de ces personnes démentes. Les travaux sur la dynamique affective et sur les répercussions d’une telle maladie sur la vie sociale de l’individu. Cette évolution scientifique s’accompagne d’une évolution sociale avec une attention particulière de la population sur ces pathologies qui concerne les personnes âgées mais pas uniquement. Il serait donc intéressant de voir qu’elle a pu être l’influence de la société sur l’approche médicale de ces pathologies.
L’engouement de la société
Lorsque l’on se questionne sur la vision de la société par rapport aux pathologies démentielles les médias apportent un élément de réponse. Suite à la canicule de 2003, les nombreux décès de personnes âgées ont placé ces derniers sur le devant de la scène.
Ces dernières années, les émissions sur la vieillesse se multiplient. Ce qui est mis en exergue par la télévision, qui est devenu l’un des médias les plus regardé, sont les pathologies de cet âge avec bien sûr la démence. Ainsi, peut-on voir le quotidien de ces personnes âgées démentes et de leurs familles à travers des émissions « réalités », de plus en plus fréquentes. Peut être que la nécessité de l’audimat, qui gouverne ce média, motive ces instants où l’on peut voir la souffrance mais aussi les joies de ces familles, faisant appel à la sensibilité des téléspectateurs.
Quoiqu’il en soit ce n’est pas tant les difficultés cognitives de ces personnes qui sont mis en avant mais bien plus la résonance de leurs pathologies dans leurs vies sociales et affectives avec leurs familles notamment. Dans ces émissions, lorsque des intervenants extérieurs sont interviewés, ce ne sont pas des neurologues ou des spécialistes de ces pathologies mais des psychiatres ou des psychologues que l’on questionne sur le retentissement psychique que peuvent avoir ces pathologies. Ainsi, les populations ne sont pas tant intéressées par l’aspect technique que revêt la démence mais bien plus par ce que cela va signifier pour leurs proches ou pour eux même, dans le bouleversement que cela introduit dans une vie. Ainsi, le recensement du déclin cognitif apporte peut, comparer au questionnement sur le bien être psychique d’un proche.
Les journaux eux aussi s’intéressent de manière grandissante à cette question de la démence du fait même qu’elle devienne une question de société. Dans ce cadre les méthodes de soins sont pointées avec les différences entre pays. Certains pays sont donc « en avance » par rapport à d’autres. La Suisse, le Canada et l’Allemagne sont ainsi des précurseurs dans tout ce qui concerne la personne âgée. En Suisse beaucoup de recherches sont menées et le maître mot des lieux de vie est de s’adapter à la personne en mettant l’accent sur ses désirs et avec beaucoup de stimulations cognitives. En Allemagne, en parallèle des structures de soins conventionnelles, pour mieux sensibiliser la société et notamment les jeunes gens, de nombreuses mesures sont mises en place. Un chercheur a mis au point une combinaison qui reproduit les sensations physiques d’une personne âgée. Ceci dans l’optique d’apporter des réponses pratiques à la vie quotidienne de ces personnes. Une autre mesure allant dans le sens d’une entraide des jeunes et des personnes âgées à été de promouvoir le travail d’étudiants auprès de ces populations avec des emplois rémunérés pour un accompagnement de vie.
En France de tels emplois n’existent pas, seules les auxiliaires de vie accompagnent les personnes âgées mais ce, pour la toilette ou le repas puis doivent aller chez un autre employeur. Mais des initiatives pour les personnes âgées mettent tout de même en évidence le questionnement de la société vis à vis de cette population. Ainsi, en mai 2006, le 28 et le 29, Le parisien a publié un recensement des meilleures maisons de retraite en accentuant sur les points positifs de chacune. La prise en charge ‘des personnes dépendantes’, dont les personnes âgées démentes font largement partie, est un critère important pour la qualité d’une maison de retraite. Les mesures pour les personnes âgées, dont le nombre croît, se multiplient donc avec les maisons spécialisées, il existe quelques maisons de retraite spécialisée dans l’accueille le soin des personnes âgées démentes, et les initiatives du gouvernement comme ‘le plan solidaire grand âge’.
De tous les médias que l’on peut consulter, Internet est, comme il est souvent nommé, « une fenêtre ouverte sur le monde ». On peut observer, grâce aux différents sites, que la maladie d’Alzheimer est la démence de référence. Lorsque l’on visite les sites intitulés démence on trouve des écrits de neurologies mais surtout des sites concernant la démence la plus répandue soit Alzheimer. Il y a beaucoup de témoignages de personnes confrontées à cette pathologie dont un des membres de la famille est atteint, avec des forums de discussion où chacun peut exprimer son ressenti. Ceci vient illustrer l’impact de cette maladie sur le cercle familial avec au premier plan le choc que suscite la modification de la représentation que l’on pouvait avoir d’une personne.
Dans un second temps, le vécu des familles reprend la vie dans sa sphère concrète, avec les différentes structures d’aides. Les familles étant souvent démunies par cette inversion des générations, due à la démence d’un parent. La maladie d’Alzheimer est la plus fréquente, donc la plus populaire et cela a une incidence au niveau des recherches médicales. Dans le langage courant, elle condense à elle seule les pathologies démentielles, peu connue sous le nom de démence qui fait plus référence à un terme de psychiatrie dans les esprits. Ainsi, lorsque que des troubles cognitifs apparaissent chez un proche, tous pensent à la maladie d’Alzheimer.
Plus largement ce que l’on peut observer est l’importance des sites sur ce sujet avec un regain d’intérêt, ces dernières années, pour ces pathologies. L’augmentation de l’espérance de vie amène de nouveaux questionnements que met en exergue la démence, qui demeure une pathologie le plus souvent associée à l’âge. Mais ce phénomène de société ne s’observe pas dans tous les pays et il serait intéressant, dans le cadre d’une recherche interculturelle, de s’orienter vers la survenue de ce trouble par rapport à la structure familiale. Dans nos sociétés, on entendant souvent, mais pas toujours, dans l’anamnèse de la personne âgée un isolement ou d’une perte d’un compagnon de vie très investit précédent la survenue de la démence.
L’âge de la survenue de ces troubles démentielles est aussi un point qui peut être à l’origine de l’assaut populaire de ce thème. La maladie d’Alzheimer, notamment, peut toucher des personnes jeunes. Ces pathologies ne concernent plus dès lors les personnes âgées uniquement mais tout le monde. Ce dernier point est accentué par le fait, qu’au sein d’une famille, il devient rare de ne pas avoir été confronté à une pathologie démentielle. Ce problème devient dès lors une question de société.
Impact au niveau médical ainsi que pour la prise en charge
Les recherches de ces dernières années concernent pour la plupart la pathologie Alzheimer. L’autre démence qui introduit diverses recherches est la démence à corps de Lewy, qui occupe la deuxième place au niveau de la fréquence d’apparition. Ainsi, l’influence épidémiologique apporte une contribution non négligeable à l’orientation des recherches et sur l’appréhension même de ces pathologies. Des unités de soins pour personnes âgées démentes se sont crée avec principalement des unités pour patient atteint de la maladie d’Alzheimer. Cette pathologie reprend parfois à elle seule l’entité des démences dégénératives qui sont reprises sous ce terme générique de démences de type Alzheimer.
La prégnance de la démence aujourd’hui et les progrès médicaux s’influencent l’un l’autre. Les institutions spécialisées se développent avec des soins adaptés aux personnes âgées démentes dans certains lieux. Mais le coût demeure un problème important tant pour les institutions que pour les familles. La prise en charge ne s’arrête pas aux personnes âgées mais dans certains cas une prise en charge de la famille peut avoir lieu, apportant des bénéfices thérapeutiques secondaires à la personne souffrant de démence.
Ce terme de souffrance est important car le sujet souffre de sa démence de même que sa famille. Il ne s’agit pas de prendre en charge les besoins corporels de ces sujets mais de les prendre comme une unité à savoir dans leurs dimensions corporelle et psychique. Sur ce point des progrès sont notés dans les institutions de soins et sont souhaitables dans les avancées à venir.
Les progrès médicaux ont amené les individus à mieux vivre ne serait ce que par la reconnaissance du trouble et de son impact au niveau cognitif mais aussi psychique et affectif. Les avancées médicales et thérapeutiques ont fait naître des demandes qui participent à enrichir la prise en charge des personnes âgées démentes.
Ce champ de travail amène beaucoup de questionnements et notamment en ce qui concerne les pathologies démentielles. Une question, par exemple, pourrait se poser sous cette forme pour les démences dont l’étiologie demeure incertaine : Le retrait du sujet du monde extérieur, observé dans les cas de démence allant parfois jusqu’au mutisme, est-il une conséquence des troubles de cette affection ou bien plus, une manifestation défensive des pulsions d’autoconservation face à un isolement ressenti, un appauvrissement des investissements narcissiques ?